2.3 Crédibilité complète

Pour la tarification et le calcul de la prime, les actuaires cherchent à obtenir l constante la plus proche de la variable aléatoire \(S\), et donc l’espérance \(\mu_{S}\). Le problème, en pratique, est que cette valeur est inconnue. En effet, on observe des réalisations d’une variable aléatoire, mais nous n’observons pas l’espérance.

Par contre, les actuaires savent qu’une réalisation \(s\) d’une variable aléatoire \(S\) stable d’ordre (\(K,p\)) a une probabilité \(p\) d’être à plus ou moins \(K\)% de la moyenne \(\mu_S\). Ainsi, ils utiliseront une observation \(s\) comme un estimateur crédible d’ordre (\(K,p\)) de \(\mu_{S}\).


Il semblerait que nous sommes dans un paradoxe, car seulement deux situations sont possibles:

1- Pour savoir si \(S\) est stable d’ordre (\(K,p\)), nous devons connaître les paramètres et propriétés de la variable aléatoire \(S\). En connaissant les paramètres de \(S\) d’une loi, nous pouvons calculer directement \(\mu_{S}\) et il n’est plus nécessaire de chercher à l’estimer.

2- Si nous ne connaissons pas \(\mu_{S}\), ni les paramètres d’une variable aléatoire \(S\), il devient impossible de savoir si \(S\) est stable d’ordre (\(K,p\)).


Exemple 2.12 Nous travaillons ave les deux situations suivantes:

1- On suppose que \(S \sim Uniforme(100,200)\);

2- On suppose que \(S \sim Uniforme(a,b)\).

Proposez une tarification de \(S\), i.e. \(E[S]=\mu_{S}\).

(Développement à faire en classe)

2.3.1 Astuce pour la somme composée

Bien qu’il n’y ait pas de solution au paradoxe pour la loi uniforme, les actuaires ont développé une stratégie pour la situation de la somme composée.

Pour la fréquence, la condition de stabilité sur une somme composée \(S\) dépend de \(\lambda_{0}\) et \(\lambda_{cc}\). Les actuaires supposeront que le nombre de sinistres observés \(n\) correspondra à \(\lambda_{0}\) et \(\lambda_{cc}\).

Pour la sévérité, le passage est un peu plus intuitif: le nombre de sinistres observés \(n\) correspond à \(n_{cc}^S\).


Proposition 2.10 On accorde à l’expérience de sinistre observée \(s\) une crédibilité totale (ou complète) d’ordre \((K,p)\) si elle provient d’une variable aléatoire \(S\) respectant la relation exprimée par l’équation:

\[\begin{eqnarray*} \Pr[(1-K) \mu_{S} < S < (1+K) \mu_{S}] &\ge& p \end{eqnarray*}\]


Exemple 2.13 Les actuaires supposent que la variable aléatoire \(S\) modélisant la charge totale de réclamations de Bombardier et celle pour Pangloss Automobile suit une Poisson composée, avec \(N \sim Poisson(\lambda)\) et \(X_i \sim Exponentiel(\beta)\).

L’historique de sinistre des deux constructeurs, et celui de l’industrie, sont résumés dans le tableau suivant:

Cie. Charge pure Nb. de sin.
Bombardier 12.51 3,251
Pangloss 11.49 983
Industrie 18.23 49,486

Pour la charge totale, indiquez si la variable \(S\) de la sinistralité de Pangloss Automobile, et celle de Bombardier, sont stables d’ordre \((K = 0.05, p=0.90)\).

(Exemple à faire en classe)

Exemple 2.14 Pour les deux constructeurs, proposez une tarification de \(S\) (trouvez un estimateur de \(E[S]=\mu_{S}\)).

(Exemple à faire en classe)

Attention aux arrondis: Le calcul du critère de stabilité complète, et de crédibilité complète, indique la valeur minimale de \(\lambda\) pour un modèle de la Poisson composée. Si la valeur obtenue par notre calcul indique \(\lambda_{cc} = 1082.1\), même s’il est tentant de penser que nombre de sinistres observés \(n= 1082\) respecte le critère de crédibilité, et ce n’est pas car \(n < \lambda_{cc}\) car \(1082 < 1082.1\)!

Comme le nombre de réclamations est une valeur entière, mais pas nécessairement \(\lambda_{cc}, \lambda_{0}\) et \(n_{cc}^S\), il ne faut pas arrondir ces 3 dernières valeurs, mais plutôt prendre la fonction plafond pour obtenir le nombre minimal de sinistres qui respectent le critère de stabilité.