1.4 Concepts mathématiques de base en actuariat IARD

1.4.1 Fréquence, sévérité et charge totale

Proposition 1.1 La fréquence de réclamations correspond au nombre de sinistres observés par unité d’exposition.

\[\text{Fréquence} = \frac{\# \text{sinistres}}{\# \text{exposition}}\]


Proposition 1.2 La sésévrité de réclamations correspond au coût moyen d’un sinistre:

\[\text{Sévérité} = \frac{\text{Coûts totaux enregistrés}}{\# \text{sinistres}}\]


Proposition 1.3 La charge pure est le coût du risque: il s’agit du montant dont doit disposer l’assureur pour dédommager (en moyenne) les assurés suite aux sinistres survenus, sans excédent, ni déficit. En d’autres mots, il s’agit du coût d’assurance par unité d’exposition.

\[\begin{eqnarray*} \text{Charge pure} &=& \frac{\text{Coûts totaux enregistrés}}{\# \text{exposition}}\\ &=& \frac{\# \text{sinistres}}{\# \text{exposition}} \times \frac{\text{Coûts totaux enregistrés}}{\# \text{sinistres}} \\ &=& \text{Fréquence} \times \text{Sévérité} \end{eqnarray*}\]


En pratique, en prenant la charge totale moyenne, nous obtenons ce que les praticiens appelent souvent la prime pure. En d’autres mots, la prime pure pourrait ressembler à la prime que doit payer les assurés. L’utilisation de l’adjectif pure vient du fait que certains éléments sont inclus dans la prime pure:

  • Le coût de remplacement des biens;
  • Les frais pour les experts en sinistre (pouvant être associés directement à chaque dossier);
  • Les frais légaux (pouvant être associés directement à chaque dossier);
  • etc.

D’autres coûts ne sont pas inclus dans le calcul de la prime pure:

  • Profit;
  • Chargement de sécurité;
  • Dépenses générales (fixes ou variables);
  • etc.

Lorsque ces derniers éléments sont ajoutés à la prime pure, on obtient ce qu’on pourrait appeler la , qui correspond à une prime pouvant s’apparenter à la , i.e. à une prime qui est vraiment demandée aux assurés. Nous verrons plus en détails ces considérations au prochain chapitre.\

En pratique, la prime nette n’est pas toujours égale à la prime commerciale:

  • Rabais pour s’assurer de garder les clients;
  • Marketing, promotion;
  • Stratégies d’affaire;
  • etc.

Très souvent en pratique, toutes les charges supplémentaires à ajouter à la police (taxe, frais, profit, rémunération du courtier d’assurances, etc.) sont calculés proportionnellement à la prime nette.


1.4.2 Unité d’assurance: souscription, exposition et acquisition

Proposition 1.4 Une unité correspond au produit d’assurance acheté en vue de protéger un bien. Une assurance sur un véhicule, ou une assurance sur un logement ou une maison, correspond à une unité d’assurance.


Proposition 1.5 Typiquement, une assurance en IARD est d’une durée d’un an. On parle de la souscription d’une unité souscrite d’assurance lorsque l’assureur a contracté avec un assuré la protection d’une unité d’assurance pendant un an. Exemple: le 5 janvier 2018, vous téléphonez à une compagnie d’assurances pour assurer votre voiture. Une unité souscrite doit être ajoutée à la compagnie d’assurances pour le mois de janvier 2018.


Proposition 1.6 L’exposition au risque correspond à la période de temps (en jours, en heure, etc.), sur une durée donnée, pour lequel l’assuré était couvert par l’assurance. On parle aussi d’unité acquise dans une telle situation.


Par exemple, pour l’année 2022, un assuré sera couvert pour 180 jours si un assuré possède une assurance commençant le 1er juillet 2022 jusqu’au 30 juin 2023.

Attention: l’exposition au risque n’inclut pas l’exposition future, c’est-à-dire l’exposition au risque ayant lieu, par exemple, en février prochain. Ce qui n’est pas encore acquis est souvent appelé unité non-acquise.


Proposition 1.7 La prime souscrite correspond à la prime annuelle d’un assuré multipliée par son unité souscrite.


Proposition 1.8 La prime acquise pour une période donnée correspond à la prime annuelle d’un assuré multipliée par son pourcentage annuel d’exposition au risque, si la prime annuelle est restée identique pendant la période.

Si la prime annuelle a été changée durant la période, on calculera la prime acquise en divisant la période totale en morceaux de périodes oũ la prime était égale et en sommant le tout.


Exemple 1.4 Un assuré souscrit une assurance commençant le 15 décembre 2014 jusqu’au 15 décembre 2015. Sa prime annuelle est de 500$. \

  1. Quelles sont les unités souscrites de cet assuré pour les années 2014 et 2015?
  2. Quelles sont les primes souscrites de cet assuré pour les années 2014 et 2015?
  3. Quelles sont les unités acquises et non-acquises de cet assuré pour les années 2014 et 2015?
  4. Quelles sont les primes acquises et non-acquises de cet assuré pour les années 2014 et 2015?
(Exemple à faire en classe)

Exemple 1.5 Un assuré souscrit une assurance de seulement 6 mois commençant le 15 décembre 2014 jusqu’au 15 juin 2015 (pour 183 jours). Sa prime pour son contrat de 6 mois est de 250$. \

  • Quelles sont les unités souscrites de cet assuré pour les années 2014 et 2015?
  • Quelles sont les primes souscrites de cet assuré pour les années 2014 et 2015?
  • Quelles sont les unités acquises et non-acquises de cet assuré pour les années 2014 et 2015?
  • Quelles sont les primes acquises et non-acquises de cet assuré pour les années 2014 et 2015?
(Exemple à faire en classe)

Les unités souscrites indiquées dans les états financiers d’un assureur montre ainsi le rythme de souscription des assurés dans son portefeuille. L’acquisition représente plutôt le revenu de l’assureur. Un assureur ne peut pas souscrire plusieurs assurés et partir avec les primes!


Il peut y avoir plusieurs bases pour calculer l’exposition au risque. En pratique, on parle souvent de durée d’exposition au risque (comme précédemment), mais il pourrait être justifié de se questionner sur l’utilisation d’autres critères. Avec l’avènement des appareils télémétriques sur les voitures, la distance parcourue, en kilomètres, serait-elle un meilleur indicateur de l’exposition au risque?

Est-ce que toutes les saisons doivent aussi correspondre à une exposition équivalente?


Une unité d’exposition, pour pouvoir être utiliser en pratique, doit avoir certaines propriétés:

  • être une mesure adéquate de l’exposition quantitative aux pertes;
  • être facile à déterminer et calculer pour l’assureur;
  • ne pas être sujet à manipulation par l’assuré;
  • être facile à mesurer et à enregistrer;
  • être facile à comprendre pour l’assuré.

Contrairement à l’assurance sur la vie, en assurance IARD, la majorité des produits d’assurance sont des risques à court terme. En conséquence, il n’y a pas de modélisation traitant directement des produits financiers. Les primes reçues par les assureurs sont toutefois investies sur les marchés financiers, mais ce ne sont habituellement pas des actuaires IARD qui s’occupent de cette tâche.


1.4.3 Franchise, déductible, limite et coassurance

Sur un contrat d’assurance, il est possible de retrouver des clauses évoquant les termes de franchise, de déductible, de limite et de coassurance. Il est important d’en saisir la différence, d’autant plus que mathématiquement, ils ont tous un impact important dans la modélisation.

Un déductible représente les premiers dollars à payer par l’assuré avant de pouvoir réclamer à son assureur. Le déductible évite que l’assureur ait à gérer plusieurs petites réclamations nécessitant probablement plus de dépenses de gestion que d’indemnisation. Il est bien important de comprendre que le déductible est le montant qui reste à la charge de l’assuré, peu importe le montant final de la réclamation.

En termes plus mathématiques, pour un contrat avec un déductible \(d\), nous avons donc que pour une variable aléatoire \(Y\) correspondant au coût d’une réclamation, le montant remboursé par l’assureur sera égal à:

\[\begin{equation*} g(Y;d) = \begin{cases} 0 & \text{si} \ Y \leq d\\ Y-d & \text{si} \ Y > d \end{cases}, \end{equation*}\]


Une franchise représente les premiers dollars à payer par l’assuré avant de pouvoir réclamer à son assureur. Tout comme le déductible, la franchise évite que l’assureur ait à gérer plusieurs petites réclamations nécessitant probablement plus de dépenses de gestion que d’indemnisation. Lorsque le seuil de franchise est dépassé, la totalité de la réclamation est remboursée par l’assureur.

En termes plus mathématiques, pour un contrat avec une franchise \(f\), nous avons donc que pour une variable aléatoire \(Y\) correspondant au coût d’une réclamation, le montant remboursé par l’assureur sera égal à:

\[\begin{equation*} g(Y;f) = \begin{cases} 0 & \text{si} \ Y \leq f\\ Y & \text{si} \ Y > f \end{cases}, \end{equation*}\]


Tel que son nom l’indique, la limite impose un montant maximal que l’assureur pourra payer pour une réclamation. Si une réclamation dépasse la limite prévue au contrat, l’assureur ne remboursera que la limite prévue au contant.

En termes plus mathématiques, pour un contrat avec une limite \(l\), nous avons donc que pour une variable aléatoire \(Y\) correspondant au coût d’une réclamation, le montant remboursé par l’assureur sera égal à:

\[\begin{equation*} g(Y;l) = \begin{cases} Y & \text{si} \ Y \leq l\\ l & \text{si} \ Y > l \end{cases}, \end{equation*}\]


La coassurance permet un partage proportionnel des risques entre un assuré et son assureur, selon un pourcentage réglé dans le contrat.

En termes plus mathématiques, pour un contrat avec une coassurance \(a\), nous avons donc que pour une variable aléatoire \(Y\) correspondant au coût d’une réclamation, le montant remboursé par l’assureur sera égal à:

\[\begin{equation*} g(Y;a) = a Y \end{equation*}\]


Les contrats d’assurance peuvent comporter simultanément une franchise (ou un déductible), une limite et une clause de coassurance.
Par convention, et en lien avec les prochains cours du baccalauréat et avec les examens professionnels, on applique dans l’ordre:

  1. la limite;
  2. le déductible (ou la franchise);
  3. la coassurance.

Exemple 1.6 Un assureur a un portefeuille de deux assurés:

  • L’assuré A possède un contrat d’assurance avec une franchise de 100$, une limite de 1000$ et une clause de coassurance de 30%.
  • L’assuré B possède un contrat d’assurance avec un déductible de 200$, une limite de 2000$ et une clause de coassurance de 80%.

L’assuré A subit un sinistre de 3000$, et l’assuré B un sinistre de 500$. Si les deux assurés réclament à leur assureur, quel sera le montant remboursé par l’assureur dans les deux situations?

(Exemple à faire en classe)